Au jardin ce week-end: allez-vous replanter votre sapin de Noël?

janvier 6th, 2014

Au jardin ce week-end: allez-vous replanter votre sapin de Noël?

Le sapin (ou l'épicéa), que l'on est allé choisir avec les enfants et que l'on a soigneusement décoré, a-t-il droit à une seconde vie?
 

Chaque week-end, Marc Mennessier, journaliste au Figaro, ingénieur agricole et amoureux des plantes, vous livre ses conseils et astuces pour faire de votre jardin un Éden.

À l’heure d’enlever les boules, d’éteindre les guirlandes et de ranger les santons de la crèche, je connais bien des familles où la question va se poser: faut-il oui ou non planter dans le jardin le beau sapin qui trône dans le salon? Cet arbre de taille variable, selon le budget et la hauteur sous plafond dont on dispose, a-t-il droit à une seconde vie?

Comme souvent, il y a le pour et le contre, les «pro» et les «anti». D’un côté, ceux qui veulent prolonger le plus longtemps possible, dans la grisaille de janvier et au-delà, la magie de Noël, de l’autre, ceux qui veulent tourner la page et passer rapidement à autre chose. Ceux qui, tels Idéfix pleurant à la vue d’un arbre abattu, veulent prolonger le bail du «pauvre» sapin arraché à son milieu naturel (en fait il s’agit le plus souvent de sylviculture intensive) et ceux qui estiment que le «roi des forêts» n’a pas sa place dans un jardin.

Le «vrai» sapin des Vosges se distingue de l'épicéa par ses cônes fièrement dressés vers le ciel.
 

Il y a sapin et sapin

D’abord il faut, cela va sans dire, que votre sapin soit doté de racines, donc que vous ayez acheté un sujet en motte ou en pot (ce qui au niveau national représente un peu moins de 20% des achats). Ensuite, autant l’avouer d’emblée, je suis plutôt du côté des «anti». Je n’ai rien contre ces conifères, bien au contraire! J’ai même une tendresse particulière pour le sapin, le vrai, le majestueux Abies pectinata, à l’odeur enivrante de térébenthine qui ne pousse qu’en montagne entre 400 mètres et 1800 mètres d’altitude. Également appelé sapin blanc ou sapin des Vosges, il n’a pas grand-chose à voir avec l’épicéa (ou épinette au Québec) qui appartient à un genre différent (Picea) et qui constitue, avec le sapin de Nordmann (Abies nordmanniana), l’essentiel des «sapins» de Noël vendus dans le commerce. D’abord ses aiguilles rondes à leur extrémité ne piquent pas, contrairement à celles de l’épicéa, désagréables au possible. Ensuite, Abies pectinata dresse fièrement ses cônes vers le ciel quand ceux de son cousin pendouillent vers le sol. Enfin, l’épicéa, capable de pousser aussi bien en plaine qu’en montagne et doté d’une vitesse de croissance bien supérieure, est responsable, avec le «douglas» ou pin de l’Orégon (Pseudotsuga menziesii), de l’enrésinement galopant des forêts de feuillus auquel on assiste depuis plusieurs décennies.

La percée du Nordmann

Champ de sapins de Nordmann dans le Morvan.
 

Bref, les deux arbres ne jouent pas, selon moi, dans la même catégorie. C’est si vrai que le sapin de Nordmann ou sapin du Caucase (Abies nordmanniana), très proche du sapin des Vosges, a damé le pion de l’épicéa qui ne représente plus que 30 % des achats de sapin de Noël: ses aiguilles ne piquent pas elles non plus, et, comme il supporte mieux la chaleur des logements, elles tombent moins vite que celles de son concurrent.

Quoi qu’il en soit, ces conifères ont tous un point commun: ils deviennent très grands. Trop grands. À l’état naturel, un épicéa peut mesurer jusqu’à 60 mètres de hauteur et vivre plusieurs milliers d’années! Découvert en 2008 par des forestiers suédois, le doyen de l’espèce aurait 7890 ans selon la datation au carbone 14 effectuée par des scientifiques de l’université d’Umea.

Planter de tels géants dans son jardin suppose donc que ce dernier soit assez vaste pour les accueillir. Autrement, ils risquent de devenir très encombrants. À l’instar de ces petites tortues carnivores de Floride (aujourd’hui interdites à la vente) que les gens finissaient par relâcher dans les étangs lorsqu’elles ne tenaient plus dans leur aquarium et commençaient à devenir agressives! Pour ne pas parler de ces crocodiles qu’il arrive aux pompiers de capturer dans la Seine ou les égouts de Paris…

Les petites brindilles offertes en 1975 dans <i>Pif Gadget </i>ont bien grandi!
 

Génération Pif Gadget

Si vous hésitez encore à replanter ou non votre arbre de Noël, le blog Génération Pif Gadget,vous donnera une idée assez claire de ce que sera la physionomie de votre jardin quarante ans plus tard. Dans son numéro du 18 octobre 1975, le célèbre magazine pour enfants avait fait don d’un épicéa de la taille d’une brindille à ses jeunes lecteurs. L’un d’entre eux, a eu récemment l’idée de créer ce blog pour inciter tous ceux qui avaient planté, comme lui, cet arbre minuscule dans le jardin de leurs parents à se faire connaître en envoyant témoignage et photos. Celles-ci sont très instructives: on y voit notamment des façades de maison entièrement occultées, privant leurs occupants de lumière, y compris en hiver du fait de la persistance du feuillage, des arbres démesurément hauts qui risquent de s’abattre sur les habitations toutes proches en cas de tempête et surtout de précieux mètres carrés perdus pour les massifs de fleurs, le potager ou même la pelouse. On peut objecter que les cerisiers atteignent eux aussi des volumes impressionnants mais eux, au moins, ils donnent des… cerises!

Votre sapin replanté dans un pot assez grand resservira l'année suivante.
 

Un sapin pour Noël… 2014

Une option me paraît intéressante. Elle consiste à replanter son sapin de Noël dans un pot plus grand pour qu’il resserve… l’année suivante. La vie d’intérieur convenant fort peu à ces plantes de grand air, vous devez le mettre le plus vite possible dehors, dans le jardin ou sur votre balcon, et l’arroser abondamment et régulièrement. Certaines personnes arrivent ainsi à garder leur Nordmann ou leur épicéa jusqu’à trois ans de suite en le replantant d’année en année dans des pots toujours plus grands. Au-delà, la question demeure: à moins de le planter dans une barrique ou un tonneau, il faudra bien finir par lui trouver une place définitive…

Sur votre agenda

• 25-26 janvier: Mimosalia. À la découverte des fougères, ginkgos, cycas… des plantes qui vivent sur Terre depuis plus de 300 millions d’années. Place Saint-François. Bormes-les-Mimosas (Var).

• Jusqu’au 2 février: «Noces végétales», Exposition de Tzuri Gueta, Grandes serres du Jardin des Plantes, Paris.

Leave a Reply