Entre garrigue et maquis

Aux marges sud-est de la Cévenne, la frontière est nette, brutale…

D’un côté, les derniers contreforts du massif hercynien, constitué de micaschistes, de gneiss ou de granit, de l’autre, les tables de calcaire du jurassique.

Ça n’intéresse que le géologue, direz-vous. Oh que non ! Encore plus le botaniste. Ou le jardinier.

Le constraste des deux flores est plus manifeste que la couleur du rocher.

D’un côté, les fougères, bruyères, callunes et digitales, le châtaignier, l’arbousier, le fillaire.

De l’autre, les buis, le thym, les cades, les térébinthes, l’érable de Montpellier, l’aphilanthe, l’orlaya.

Les deux à même altitude – 300/350m -, sous le même climat méditerranéen, archi-sec tout l’été et inondé en novembre.

Nuance climatique cependant : la garrigue, plate et souvent à nu, atteint des températures plus brûlantes en été et plus froides en hiver (2 ou 3 degrés au dessus ou au dessous). Le maquis, surface plus pentue, bénéficie des mouvements d’air (chaud à la montée, froid à la descente) qui atténue l’amplitude thermique.

La nature du sol est le facteur essentiel de cette ségrégation. Son Ph, surtout, mais aussi la profondeur à laquelle les traces d’eau se sont réfugiées.

Sur la garrigue, le pH monte à 8 ou plus, le sol est mince ou absent, juste quelques litres entre les failles verticales des tables. Des traces d’eau ? Il faudrait piocher à plusieurs mètres pour trouver des vestiges d’humidité. La nappe phréatique est à plus de 5m. Seules les plantes qui savent lancer profond leur racines se sont acclimatées.

Sur le maquis, le sol, constitué d’arène sableuse, a un pH qui descend parfois en dessous de 5. Seuls les endroits où les anciens avaient construit des murettes peuvent avoir une épaisseur notable de sol (de terre de bruyère). Le reste est érodé, lessivé, par les cataractes qui se déversent, en novembre, lors des « épisodes cévenols ». Ni nappe phréatique, ni rétention d’eau, hormis quelques micro-sources dans les fractures feuilletées du schiste. Tout arbre planté reste souffreteux des années, jusqu’au moment où ses racines ont trouvé un de ces points humides. Il devient alors increvable.

Quelques plantes ubiquistes se retrouvent dans les deux écosystèmes : l’yeuse (Quercus ilex), le chêne marcescent, la ronce. Ou l’olivier, mais lui n’est jamais spontané.

Car ces pays, désormais incultes, ont été autrefois très peuplés et intensivement cultivés par des paysans durs à la besogne. Mais, dans les quelques jardins qui subsistent, le même déterminisme géologique est à l’œuvre. Mon potager, issu du maquis, refuse  le chou et le thym. A trois km, celui de mon voisin est rétif à la fraise et à l’oseille.

Ce chapeau succinct est destiné à être nourri (si j’en ai le courage) de photos ou d’articles pour illustrer ces deux pays naturels.

 

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